Titre : L’Inouï
Auteur : BFL
Pages : 470
Editeur : L’Oreb
Langue : Français
ISBN : 9782940311040
Dimensions : 21 x 22.5 x 3.3 cm
Illustrations : Oui
Mais qu’entendait Socrate?
Trouvée parmi ses fragments, cette remarque de Nietzsche concernant l’ouïe, est moins anodine qu’elle ne paraît. Venue à la suite de la question socratique découverte peu avant par Schleiermacher, le père de l’herméneutique moderne, elle sous-entend un véritable séisme pour notre civilisation héritière de Platon et donc fondée sur l’“Idée” (mot qui en grec veut dire, “ce que l’on voit”).
Qu’en serait-il en effet, aujourd’hui, de la pensée et la culture occidentale, si Platon et autres disciples et commentateurs de Socrate, soucieux de “faire de lui le porte-parole de leurs doctrines respectives”, avaient pris comme point de départ, non pas le “personnage littéraire” et plutôt “fictionnel” que selon Schleiermacher ils ont forgé de leur maître, mais son expérience authentique d’écoute attestée maintes fois par Socrate lui-même?
Tout en proclamant qu’il ne savait rien, ce maître de l’ironie ne laissait-il pas entendre simultanément que la condition et la véritable source de sa pensée était non pas un “savoir” fondé sur des idées et des concepts, mais bien un percept : une perception vive et simple qui s’offrait à lui sous la forme d’une audition?
Ne confessait-il pas que depuis son enfance il était habité par “un bruit”, une résonance salvatrice dans laquelle il reconnaissait “la voix bienveillante d’un guide infaillible”, un “signe divin” et la condition de l“’authentique art politique”? Ne déclarait-il pas que son affaire était même… “la musique”…?
L’effondrement des idéologies, les impasses de la pensée conceptuelle et le déplacement de la vue à l’ouïe, qui selon Hannah Arendt s’est produit dans la pensée occidentale à partir de Bergson, nous prédisposent aujourd’hui à considérer ce témoignage, certes in-ouï, mais décisif du
“père de la pensée occidentale”.
L’heure a-t-elle sonné d’être ainsi à l’écoute?
A l’aube toujours naissante d’“un autre commencement du penser”…